
L’impunité continue pour tous les crimes graves commis au cours du conflit israélo-palestinien nuit à l’instauration de la confiance nécessaire à une paix juste et durable. L’adhésion de la Palestine ou d’Israël à la Cour pénale internationale (CPI) pourrait permettre aux victimes de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité des deux pays d’avoir accès à la justice internationale.
Si Israël affirme ne pas avoir l’intention d’adhérer à la CPI, les autorités palestiniennes ont promis de le faire, en retardant toutefois les démarches nécessaires à cette adhésion. En effet, bien que la procureur de la CPI ait déclaré que la Palestine pourrait devenir membre de la CPI, l’État palestinien subit les pressions d’Israël, des États-Unis et d’autres pays visant à le dissuader de s’engager sur cette voie.
L’UE, qui pour d’autres situations se positionne contre l’impunité (par exemple concernant le Soudan, la Syrie, la Corée du Nord et la Libye), a prévenu la Palestine qu’il lui fallait « utiliser son statut de membre de l’ONU de manière constructive sans entreprendre de démarches qui l’éloigneraient davantage d’une solution négociée ». En outre, des États européens de premier plan, notamment le Royaume-Uni et la France, se sont publiquement opposés à toute tentative de la Palestine d’adhérer à la CPI.
UNE POSITION QUI NOURRIT L’IMPUNITÉ
Cette stratégie est malavisée, et va à l’encontre des intérêts de l’UE qui cherche à encourager la résolution de ce conflit. Le fait de s’opposer à l’adhésion de la Palestine à la CPI ne fait que nourrir l’impunité et nuit à la justice internationale. Les pays de l’UE qui font pression sur la Palestine pour qu’elle n’entreprenne pas de telles démarches vont également à l’encontre de l’engagement qu’ils ont pris en tant que membres de la CPI, à savoir encourager l’adhésion d’autres Etats à la Cour.
D’éminents experts internationaux se sont exprimés en faveur de l’adhésion de la Palestine à la CPI et contre la prise de position de l’UE. Dans un article du New York Times, Navi Pillay, ancienne Haut-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU et ancienne juge à la CPI, déclarait : « La meilleure contribution que les Européens puissent apporter à la paix […] serait de mettre fin à leur hypocrisie et d’encourager la Palestine à adhérer à la CPI. »
En savoir plus : Le rehaussement du statut de la Palestine à l’ONU doit ouvrir la voie à la justice
Dans le quotidien britannique The Independent, Sir Desmond de Silva, QC, ancien procureur général en Sierra Leone, et Sir Geoffrey Nice, QC, ancien procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), ont fait valoir que « la position de l’UE nuit à ses propres intérêts et investissements, ainsi qu’à l’espoir d’une paix durable », tandis que deux commentateurs experts de la question, membres du Conseil européen des relations étrangères, mettaient l’Europe au défi d’expliquer « la différence entre le soutien qu’elle manifeste à l’égard des normes internationales et son opposition aux initiatives de la Palestine en vue de son adhésion à la CPI ».
Sur le même sujet : La Palestine doit adhérer maintenant à la Cour pénale internationale
UNE OBLIGATION DE RENDRE DES COMPTES
L’obligation de rendre des comptes à l’échelle internationale ne saurait s’appliquer de manière sélective. Les pays de l’UE devraient s’abstenir d’exercer de nouvelles pressions sur la Palestine visant à la dissuader d’adhérer à la CPI, et se prononcer en faveur d’une reconnaissance universelle de la compétence et du travail de la Cour. Cela permettrait à l’UE de se conformer à la position qu’elle a publiquement adoptée en soulignant l’importance de ne pas laisser impunis les crimes graves qualifiés par le droit international.
Position commune d’Amnesty International, de la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH), de Human Rights Watch, Broederlijk Delen, Christian Aid et IKV Pax Christi Flandres